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avril 2012

Loppin & Jean - Vertus (51)

Le pragmatisme règle de Vertus

En 85 ans, l’entreprise Loppin & Jean est passée de la quincaillerie de centre-ville à un groupe régional spécialisé dans le négoce de produits sidérurgiques, matériaux et fourniture industrielle. Disposant de capacités de stockage parmi les plus importantes du nord de la France, cette société familiale champenoise s’appuie notamment sur sa force logistique, gage de réactivité et de compétitivité, pour se différencier sur le marché.

Depuis 1927, le nom Loppin & Jean résonne à travers la plaine champenoise, et bien au-delà, comme celui d’un spécialiste en produits sidérurgiques, fournitures industrielles et matériaux.

De Henri à Alexandre Jean, en passant par Michel et Frédéric, quatre générations participent ainsi au développement de cette entreprise familiale qui fête cette année ses 85 ans.

Quatre générations

A l’origine de l’aventure, se trouve également un M. Loppin, comme le reflète aujourd’hui encore l’appellation de la société. C’est à lui que le distributeur doit son implantation à Vertus, dans la Marne, un petit village de 3 000 habitants, situé au sud de la renommée Côte des blancs, à une vingtaine de kilomètres d’Epernay, une cinquantaine de Reims et une trentaine de Châlons-en-Champagne. Co-propriétaire d’une quincaillerie située à Châlons dans laquelle travaillait Henri Jean, M. Loppin décide effectivement d’implanter à la fin des années vingt une quincaillerie dans le centre-ville de Vertus. Plus investisseur qu’exploitant, il confie la direction de cette nouvelle affaire à Henri Jean. Grimpant peu à peu dans le capital de l’entreprise vertusienne, Henri Jean et son fils Michel en acquièrent la totalité des parts à la fin des années cinquante.

En 1978, Frédéric Jean, fils de Michel et actuel président, reprend les rênes de la société familiale, aux côtés de son père. Et en 2006, Alexandre, le fils de Frédéric, prend à son tour sa place au sein de Loppin & Jean, après plusieurs années d’expérience professionnelle dans le secteur bancaire.

De la quincaillerie de centre-ville...

Au fil des ans, on s’en doute, Loppin & Jean a connu de nombreuses évolutions. Lorsque Frédéric Jean intègre la société, elle réalisait un chiffre d’affaire de 40 millions de francs et employait vingt personnes. Aujourd’hui, elle s’appuie sur une centaine de personnes et effectue un chiffre d’affaires global de 65 millions d’euros, dont 57 millions pour le site de Vertus et 9 millions pour ATP, sa filiale de Troyes, dans l’Aube.

A la fin des années 70, pour faire face à son expansion, Loppin & Jean est l’une des premières entreprises à s’implanter sur la toute nouvelle zone industrielle de Vertus. Elle conservera son magasin de centre-ville jusque dans les années 90 tout en développant un nouveau point de vente de 3 000 m2. En 1997, celui-ci sera réaménagé sur deux niveaux de 2 000 m2 chacun. « Mon père était en quelque sorte visionnaire. Il a dès le départ acquis sur cette zone deux hectares de terrain » se félicite Frédéric Jean.

Deux autres hectares sont acquis en 1998, permettant la construction de nouveaux bâtiments de stockage réalisée en plusieurs phases dont la dernière en 2008.

... au groupe régional

Jusque dans les années 1980, l’activité de Loppin & Jean repose sur la fourniture industrielle - quincaillerie et sur le négoce sidérurgique. L’arrivée dans l’entreprise d’un commercial issu de l’univers du négoce en matériaux favorise le développement de cette nouvelle activité à Vertus. « Nous considérons les matériaux comme un apport dans la gamme, d’autant plus qu’en zone rurale, nous nous adressons à une clientèle mixte, de professionnels et de particuliers. Mais cette structure n’a pas vocation à prendre de l’ampleur ». Représentant 15 à 20% du chiffre d’affaires de la société, cette offre bénéficie toutefois des investissements nécessaires à sa commercialisation, en témoigne la rénovation de la salle d’exposition pour le sanitaire-chauffage-menuiserie.

Proximité et service

Etant donné l’implantation rurale de l’entreprise, la gamme Bâtiment permet aussi de répondre aux besoins d’une clientèle de proximité, notamment celle des agri-viti (agriculteurs et viticulteurs) et des castors, ces bricoleurs lourds qui n’hésitent pas à entreprendre eux-mêmes des travaux importants. Pour favoriser la visibilité de cette offre auprès de ces cibles, Loppin & Jean a signé un partenariat avec le Club des Vignerons Indépendants de Champagne et est partenaire de différentes opérations menées par la FDSEA 51 (Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles). « Cela nous permet d’aller chercher cette clientèle de proximité que nous avions quelque peu délaissée, sans mettre un commercial sur la route ». A noter que Frédéric Jean est également très ancré dans le tissu économique et social régional puisqu’il est notamment juge au Tribunal de Commerce et membre de la Chambre de commerce.

La présence d’une offre ménager dans le point de vente traduit également le positionnement de proximité du distributeur. « Nous arrêtons le cadeau mais nous avons conservé l’activité historique de petit ménager. Pour nous, c’est du service » indique Alexandre Jean.

Un plan de vente large

Cette offre à multifacettes a longtemps été l’un des points forts de Loppin & Jean, un véritable facteur de différenciation et de service. Globalement, l’entreprise commercialise environ 60 000 références. « Nous avons réussi à fidéliser des clients industrie avec notre plan de vente même si sa largeur n’a sans doute aujourd’hui plus le même impact qu’auparavant. Néanmoins, nous visons des PME utilisatrices de produits de fournitures industrielles ou sidérurgiques et grâce à notre gamme large, nous optimisons le chiffre d’affaires que nous pouvons développer avec elles » explique Frédéric Jean.

L’acier, le cœur de métier

Le négoce d’acier représente de loin la première activité de l’entreprise, à hauteur de 60% de son chiffre d’affaires. Elle s’appuie sur un site couvert de 20 000 m2, implanté à Vertus à 500 mètres du site principal, dont 14 000 m2 dédiés au stockage et 6 000 m2 à la préparation des commandes et à l’expédition. Par ailleurs, l’entreprise a investi sur trois scies automatiques pour le parachèvement de la coupe, en mesure de réaliser de la grande série. « Si on voit ce métier juste comme du négoce, on se contente d’acheter en gros et de revendre au détail. Nous cherchons de plus en plus à proposer de la transformation à nos clients pour répondre à une demande croissante en ce sens » explique Alexandre Jean. « Actuellement, ces activités sont souvent encore effectuées par nos clients. L’idée est de leur faire accepter qu’en intégrant ces tâches, nous leur ferons gagner du temps et de l’argent, ce qui leur permettra d’être plus actifs commercialement. C’est un apport de service ».


Un rayonnement régional

Complémentaire, l’activité de fourniture industrielle - quincaillerie représente de son côté 20 à 25% du chiffre d’affaires de l’entreprise. Si la recherche d’une clientèle de proximité est de rigueur au niveau du bâtiment, la cible géographique de l’entreprise est beaucoup plus large en ce qui concerne le négoce d’acier et la FI. La région est effectivement plus réputée pour son activité agricole et viticole (machinisme, équipement) que pour la grande industrie. « Nous sommes donc obligés d’aller chercher plus loin nos clients, surtout pour les produits sidérurgiques ». Par conséquent, Loppin & Jean agit sur un rayon de 250 kilomètres autour de Vertus, dans les régions limitrophes : La Lorraine, la Bourgogne, l’Ile-de-France.

L’entreprise s’appuie ainsi sur une force itinérante en charge de l’activité sidérurgique et de la fourniture industrielle : deux commerciaux sur les Ardennes, deux pour la Marne et la Haute-Marne, un sur l’Aisne et un sur la Seine-et-Marne. L’Aube et L’Yonne sont gérées depuis l’agence ATP de Troyes. Toutefois, sur le plan local, dans un rayon de 30 km, un commercial est en charge des matériaux et de la FI. « La FI est un secteur en progression. C’est un marché où la notion de services est importante. Nous avons une logistique intégrée qui nous permet de faire la différence. Cela nous donne réactivité et souplesse ».

Une force logistique

La force logistique de Loppin & Jean est incontestablement l’un de ses principaux atouts. L’entreprise s’appuie ainsi sur une importante flotte logistique en propre qui se décline en onze semi-remorques, des camions grues et des petits camions de livraison de type « fourgons ». Par ailleurs, elle dispose d’une capacité de stockage qui figure parmi les plus importantes du nord de la France.

Au-delà de l’entrepôt de 20 000 m2, dédié au stockage et à la transformation de l’acier, Loppin & Jean dispose de 3 000 m2 de bâtiments pour le stockage des matériaux de construction et de 2 500 m2 pour la fourniture industrielle. Cette capacité de stockage n’a pas été remise en question, ni par l’entrée en vigueur de la réduction des délais de paiements en 2007, ni par les risques liés à la volatilité des cours au niveau de l’acier. Elle constitue aujourd’hui un avantage compétitif indéniable, notamment dans la FI à l’heure où de nombreux groupes intégrés soumis à de fortes exigences de rentabilité ont mis en place des plans de gestion drastiques. « Les fournisseurs se plaignent de plus en plus que les distributeurs ne font plus leur métier de stockiste. Ce n’est pas notre cas. Cela fait partie de notre métier » souligne Alexandre Jean.

Taille critique

Le développement de la fourniture industrielle passe notamment par le recrutement de vendeurs de plus en plus spécialisés dans chaque segment de marché pour affirmer un positionnement de multispécialiste. « Mais, avec notre implantation en milieu rural, nous avons du mal à attirer des candidats » regrette Alexandre Jean.

Réalistes et pragmatiques, les dirigeants de Loppin & Jean estime que la croissance de l’entreprise, à périmètre égal, se fera surtout en fonction de l’évolution du marché. « Si nous voulons nous développer, nous devrons aller de plus en plus vers de nouveaux produits comme par exemple les produits transformés au niveau de l’acier ». Des opérations de croissance externe ne sont pas exclues. « Notre problème est de disposer de la structure de ressources humaines nécessaire pour intégrer une entreprise ». L’acquisition d’un autre distributeur indépendant, cédé pour cause de départ à la retraite de son propriétaire, suppose effectivement souvent la nomination d’un directeur de magasin, et de disposer des ressources internes nécessaires.

Confrontée à une taille critique, l’entreprise familiale devrait faire face à de nouvelles perspectives de développement dans les années à venir, dans un contexte de visibilité évidemment atténué par le climat économique. « Heureusement, nous avons réalisé la majorité de nos investissements immobiliers entre 2000 et 2008. Nous avons fait les investissements nécessaires pour nous permettre de faire le marché dans de bonnes conditions, avec une rentabilité correcte. Nous nous sommes ainsi donné les moyens d’attendre que des opportunités se présentent ou qu’une reprise de la croissance lève les barrières à l’investissement » conclut Frédéric Jean.

Agnès Richard

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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