Les abrasifs appliqués
Le grain céramique montre tout son mordant
Famille importante pour un distributeur, les abrasifs appliqués associent aujourd’hui souvent leurs efforts d’innovation au grain céramique, dont les atouts en termes d’enlèvement de matière et de gain de temps rencontrent, notamment, les attentes des utilisateurs centrées sur la productivité. Néanmoins, ce type de produits, même s’il se déploie dans les gammes, ne représente encore qu’une petite part des ventes. A grand renfort de démonstrations et de formation, l’objectif des fabricants est de développer les produits techniques dans la distribution, sources de durabilité, de gain de temps, de confort et de sécurité.
C’est l’un des secteurs incontournables d’une quincaillerie-fourniture industrielle, l’une de ses toutes premières familles. Représentant environ 60% du marché des abrasifs dans l’univers professionnel, les abrasifs appliqués ont pris le pas depuis plusieurs années sur les abrasifs dits agglomérés. L’autre grand segment du marché des abrasifs est probablement pénalisé plus par une baisse inexorable de ses prix moyens plutôt que par une régression de la demande.
Affichant un chiffre d’affaires stagnant de l’ordre de 120 à 130 millions d’euros, les abrasifs appliqués sont, toutefois, considérés comme un univers mature. Ce marché de consommables suit évidemment l’évolution de l’activité économique et compte de nombreux intervenants dont notamment deux grands leaders, le Français Saint-Gobain Abrasifs (marques Norton et Flexovit) et l’Américain 3M (marques 3M et Scotch-Brite). Le premier fabrique une grande partie des abrasifs appliqués qu’il commercialise en fournitures industrielles sur son site de Conflans Ste Honorine (78). Le groupe 3M n’est pas en reste puisque son site de Beauchamp (60) abrite son centre de recherche européen en abrasifs non tissés. Ces deux fabricants se présentent comme les seuls à maîtriser la fabrication de l’ensemble des composants entrant en vigueur dans un abrasif appliqué, à commencer par le grain.
Des milliers de références
Si, dans ses grandes lignes, la meule agglomérée est constituée de particules abrasives incorporées dans un liant qui prend forme dans un disque de dimensions quasiment standardisées pour répondre à des besoins d’ébarbage et surtout de tronçonnage, l’abrasif appliqué ne se contente pas de si peu...
Ce consommable, qui désigne un corps dur et tranchant capable d’enlever de la matière sous l’effet d’une action mécanique (manuelle ou machine), est en mesure d’usiner (de l’ébarbage à la super finition) la surface de la plupart des matériaux (bois, métaux, verre, fibre de verre, fibre carbone, plastique, composites...), le tout, bien entendu, sans chauffer la pièce pour ne pas en altérer les propriétés mécaniques et les caractéristiques esthétiques. L’abrasif appliqué se compose ainsi de trois éléments principaux, tout aussi essentiels les uns que les autres : un support souple ou semi-rigide, un liant qui sert de couche de liaison et d’un grain abrasif. Jouant sur ces trois paramètres, la multiplicité des déclinaisons caractérise un univers hautement technique et ô combien complexe, qui se répercute au final en des gammes de plusieurs milliers de références pour les plus complètes. Chez 3M, par exemple, environ 2 500 références sont annoncées, Elles s’élèvent à près de 3 000 chez Norton et à plus de 1 500 chez Flexovit. Et pour les spécialistes de cette catégorie de produits, pas question de réduire l’assortiment, au contraire même, les gammes tendant plutôt à s’étoffer avec des produits précisément adaptés à l’application finale.
Dans les appliqués, le mot d’ordre est clair. Il n’y pas une seule solution à un besoin client, mais plusieurs solutions possibles en fonction des besoins de production, de l’équipement en machines, des niveaux de finition souhaités, des habitudes de travail et plus globalement des applications. En outre, l’évolution technologique des produits contribue aussi à ce que la destination des différents types d’abrasifs se chevauche de plus en plus. Par exemple, dans certaines applications, des non-tissés peuvent aujourd’hui convenir pour des applications auparavant dévolues aux disques à lamelles. Les performances de certains abrasifs appliqués peuvent même concurrencer les meules agglomérées dans leur fonction d’ébarbage.
D’ailleurs, alors que le marché professionnel des abrasifs est détenu essentiellement par des fabricants européens, la plupart se déploient aujourd’hui sur les deux marchés, appliqués et agglomérés, voire même jusqu’au diamant. Un atout non négligeable pour asseoir ses positions auprès de la distribution, notamment vis-à-vis des plus petits magasins qui atteignent ainsi plus facilement les francos et disposent ainsi d’un service complet sur une même famille de produits.
L’expression d’un savoir-faire
Ainsi, plus la gamme est large, allant de l’enlèvement de matière important jusqu’au poli-miroir, plus la marque a l’opportunité de servir les besoins du client même si tous les segments de produits ne rencontrent pas le même succès. Forcément, cela implique aussi une complexité logistique, à laquelle répondent les fournisseurs par une grande réactivité et donc souvent une puissance de stockage importante, les distributeurs se centrant souvent uniquement sur le fameux 20/80. Chez Norton par exemple, ce sont ainsi plus de 2 300 références qui sont stockées.
Marché hautement technique, l’abrasif appliqué est aussi le fruit de multiples compromis, selon l’application et du résultat attendu. Il résulte d’une recette souvent très personnelle en fonction des fabricants qui jouent sur la souplesse ou la rigidité du support, le mélange d’abrasifs, leur disposition ou encore leur orientation, la nature du liant, etc. Ceci contribue aussi à ce que tout changement d’abrasifs par un client final, habitué à un certain rendement, une certaine qualité de finition, ne s’effectue pas sans réflexion et souvent au prix de tests s’étalant parfois sur plusieurs mois. Cela suppose un accompagnement des fournisseurs avec parfois la présence d’ingénieurs application sur les sites industriels des clients, capables de calculer précisément les gains annuels que vont apporter les produits, voire même aider à l’élaboration d’un nouveau processus, comme par exemple la mise en place de la robotisation.
Ces mesures ne se contentent pas d’apprécier les qualités intrinsèques de l’abrasif. Elles prennent en compte de multiples critères comme le temps de changement des bandes et autres disques, les vibrations émises et la réduction de la pression nécessaire, dans le but d’atténuer les risques de troubles musculo-squelettiques pour l’opérateur, ou encore les rejets de poussière liés aux opérations.
Cette complexité à choisir un nouveau produit n’empêche pas les fabricants de travailler en permanence sur l’un ou l’autre des paramètres de l’abrasif pour s’adapter aux nouveaux matériaux (bois exotiques, matériaux composites, titane...) et offrir toujours plus de valeur ajoutée, en termes de productivité, qu’il s’agisse de l’enlèvement de matière, de la durée de vie du produit ou de la qualité de la finition. Intervenant en fin de process de fabrication, sur des pièces qui ont donc déjà une certaine valeur, l’abrasif appliqué est de plus en plus recherché par les entreprises soucieuses de la maîtrise de leurs coûts, pour sa performance et sa productivité. Pour l’utilisateur, il s’agit de gagner du temps dans l’usinage de la pièce, en lui permettant de travailler plus vite avec des abrasifs à l’agressivité supérieure capables d’enlever la matière nécessaire plus rapidement, en préparant au mieux la phase de finition et en améliorant la précision de la géométrie de la pièce ou de son état de surface sans l’endommager. Cette quête de productivité passe également par des produits de conception innovante comme le disque à lamelles à vision stroboscopique de Rhodius qui permet à l’utilisateur de voir le travail à travers l’abrasif lorsque ce dernier tourne à 12 000 tr/min sur la machine et ainsi de gagner en précision. Certains produits associent également plusieurs atouts, par exemple enlèvement de matière et début de finition, offrant la possibilité aux professionnels d’économiser quelques étapes dans le processus.
Différents types de grains
Les évolutions les plus marquantes concernent incontestablement la nature du grain, sachant que la capacité d’abrasion dépend de la forme, de la structure, de la dureté, de la durabilité, de la fragilité, de la résistance à la chaleur et de l’orientation du grain.
Là encore, différents types de grains cohabitent sur le marché. Aujourd’hui, les abrasifs naturels, comme l’émeri (composant naturel de corindon et d’oxyde de fer), le verre ou encore le silex ont été supplantés sur le marché professionnel par les abrasifs synthétiques, à la dureté et à la résistance mécanique bien supérieures.
L’oxyde d’aluminium (alox ou corindon) est sans doute le type d’abrasifs que l’on retrouve le plus fréquemment sur les supports d’abrasifs appliqués en France. Il est résistant et bien adapté à l’ébarbage de matériaux de haute ductilité comme l’acier au carbone, les aciers alliés, le bronze dur et les bois durs. Lorsque la résistance à la rupture est la principale préoccupation, il s’avère supérieur à tous les autres grains.
Le carbure de silicium est le plus dur et le plus aigu des matériaux employés dans les abrasifs appliqués. C’est l’abrasif idéal pour le ponçage des métaux non ferreux (aluminium, laiton, bronze, magnésium, titane...), le caoutchouc, les plastiques, les bois ligneux, l’émail et les matériaux relativement tendres. Le carbure de silicium se distingue par sa faculté de pénétration et de coupe plus rapide sous une pression légère.
Le zirconium alumine possède une caractéristique d’auto-affûtage qui lui confère une grande longévité dans les opérations à fort enlèvement de matière. Il convient bien à l’ébarbage grossier des métaux et à l’aplanissement, la rupture contrôlée du grain produisant en permanence de nouveaux points d’abrasion aigus. A noter que certains fabricants ont mis au point des grains spécifiques, à base d’oxyde de zirconium et d’oxyde d’aluminium (zircon), qui possèdent une structure cristalline favorisant le renouvellement constant de la surface de coupe et le phénomène d’auto-avivage des grains.
L’oxyde d’aluminium céramique, plus communément appelé céramique, est sans conteste celui qui a le vent en poupe, si l’on considère son déploiement dans toutes les gammes et sur tous les segments de produits. Il s’agit d’un abrasif durable, résistant et dense en raison de sa microstructure. Ses très petites particules, à l’échelle du micron, cassent lors de l’ébarbage, produisant de nombreuses arêtes coupantes. Comme il conserve son tranchant, notamment dans les opérations sous pression moyenne ou forte, il coupe plus vite que les autres abrasifs et est donc recommandé sur les aciers forgés ou au carbone et sur les alliages à forte teneur en nickel et en cobalt. Il est très apprécié dans de nombreux secteurs de l’industrie, et notamment la construction métallique, la chaudronnerie acier, la fonderie acier et l’assemblage automobile, d’autant que les efforts de recherche des fabricants leur permettent effectivement d’appliquer le grain céramique sur des supports au profit d’applications plus larges.
Lancé il y a une vingtaine d’années par 3 M, le grain céramique se décline aujourd’hui en plusieurs...