La découpe du carrelage
Le marché se tient à carreau
Après l’engouement post-covid, le marché du carrelage souffre des difficultés du marché du bâtiment, qui impacte évidemment les fournisseurs de systèmes de découpe. Néanmoins, pour garder leur compétitivité sur un chantier, le carreleur ou le paysagiste recherchent des machines manuelles ou électriques qui leur permettent d'effectuer des coupes précises et rapides, notamment sur les grands formats qui restent bien inscrits dans les tendances de la décoration.
Depuis belle lurette, le carrelage n’est plus réservé aux pièces d’eau et a pris toute sa place dans les espaces à vivre, au sol comme au mur, y compris dans les chambres à coucher avec des décors imitation papier peint, sans oublier les extérieurs, sur les terrasses ou aux abords des piscines. On le retrouve même en façade d’immeubles. Cet engouement favorise des produits de haute qualité, avec des carreaux souvent de haute qualité, avec des effets matière et texturés, des traitements antidérapants, et des formats qui ont pris le large pour donner aux motifs décoratifs toute leur expression, pour affirmer l’impression d’espace et d’épuration, tout en minimisant le nombre de joints visibles. Depuis quelques années, les grands formats ont effectivement le vent en poupe, dans les carrelages sol comme muraux. Les carreaux 30 x 30 cm ou 40 x 40 cm tendent à marquer le pas devant les carreaux 60 x 60 cm, 75 x 75 cm, 80 x 80 cm ou encore 90 x 90 cm. De grands formats rectangulaires se développent également, en ligne avec la tendance à l’imitation lames de parquets, et des dimensions dépassant parfois allègrement les 1 x 3,20 mètres.
Par ailleurs, d’autres familles à valeur ajoutée sont apparues comme les carreaux « slim », souvent de très grands formats et à faible épaisseur (3 à 6 mm contre 8 à 12 mm en moyenne pour les carreaux classiques) qui font fureur dans les douches à l’italienne de l’hôtellerie de luxe ou encore « slab », à forte épaisseur (20 mm), utilisés à l’intérieur comme à l’extérieur.
Cette tendance donne la part belle au grès cérame. Issu de la cuisson à très haute température d’un mélange d’argile, de silice, de kaolin et parfois d’autres matériaux spécifiques, ce matériau céramique a un talent particulier pour reproduire l’aspect des matériaux naturels, tels que la pierre naturelle ou le bois, tout en offrant des paramètres de résistance à la dureté et à l’abrasion accrus.
Les difficultés du bâtiment pèsent
Ce panorama des tendances de décoration du carrelage a surtout pour effet de mettre en relief les exigences induites concernant la pose des carreaux. On ne découpe évidemment pas avec les mêmes moyens un carreau de faïence de 40 x 40 cm qu’un produit en grès cérame pleine masse de 90 x 90 cm en 15 mm d’épaisseur. De quoi susciter, parallèlement à la créativité des fabricants de carrelage une nécessité d’innovation et d’extension de gamme chez les spécialistes de la découpe du carrelage, à l’instar du leader du marché, l’Espagnol Rubi, mais aussi de l’Italien Raimondi/Montolit, du Brésilien Cortag ou encore de PRCI, la filiale française du groupe américain Qep. Au-delà de la découpe, les spécialistes déclinent d’ailleurs souvent de larges gammes incluant les différents outils nécessaires à la mise en oeuvre du carrelage.
Néanmoins, après le formidable engouement post-covid pour la rénovation de l’habitat et l’aménagement des espaces extérieurs, le carrelage souffre des difficultés du bâtiment, qu'il s’agisse de la baisse des chantiers dans le neuf, de la crise immobilière peu stimulante pour la génération de travaux et bien entendu des arbitrages de consommation des ménages, actuellement peu propices aux opérations de rénovation de l’habitat. Le carrelage a également subi une hausse forte de ses prix, à cause notamment de l’envolée des coûts de l’énergie, du gaz surtout. Ainsi, en 2022, ce marché, évalué chaque année à 100 millions de mètres carrés, enregistre une baisse de ses volumes compensée par la hausse des prix. En 2023, les acteurs observent une stabilisation des prix de vente, mais une baisse des volumes plus prononcée.
La coupe au diapason du carrelage
Par ailleurs, cette sensibilité aux prix a incité les revendeurs à s’intéresser à d’autres sourcings. L’Espagne, premier producteur de carrelage en Europe, a ainsi perdu le premier rang mondial au profit de l’Inde, suivie par la Chine. « Cela fait pour nous nous un nouveau challenge au niveau de la coupe » explique Marion Zahar, Key account manager de la filiale française de Cortag, le fabricant brésilien qui affiche une production très intégrée, depuis l’acier en passant par les éléments en plastique.
Effectivement, c’est avant tout en fonction des évolutions du carrelage que les systèmes de découpe évolue, avec parfois de véritables enjeux, les producteurs de carrelage n’anticipant pas toujours suffisamment la façon de venir à bout de leurs produits. Les marques présentes sur le coupe-carrelage ressentent évidemment cette tension sur le marché, sachant que la durée de vie d’un coupe-carrelage peut s’étendre à plusieurs années. Cette sensibilité au prix des professionnels incite aussi de grands acteurs, comme Rubi, à développer des x, certes de qualité, mais un peu moins bien moins dotés de spécificités que leurs matériels haut de gamme, répondant davantage à de l’achat d’investissement. « Nous avons mis sur le marché des coupe-carreaux positionnés en milieu de gamme, de manière à être bien présent également sur ce segment de marché » explique Bruno François, directeur général de Rubi.
A chaque professionnel, son chantier
L’équipement varie en fonction du profil des professionnels. Au-delà des carreleurs, les entreprises générales du bâtiment se développent sur cet univers, notamment en rénovation avec des opérateurs qui interviennent sur différents corps de métier. De même, les plombiers posent de plus en plus de carrelage, notamment dans la salle-de-bain, et semblent privilégier les projets simples pour le particulier. Quant aux paysagistes, ils ont pris la main sur tout ce qui touche à la terrasse ou à la piscine. Souvent, les entreprises générales du bâtiment et les carreleurs disposent d’un équipement de base, qu’ils complètent en fonction de leurs chantiers, par exemple s’ils sont confrontés à de grands formats ou à des surfaces importantes. « Les carreleurs sont souvent réticents à investir. Mais, à un moment donné, s’ils ont plusieurs chantiers, exigeant une technicité de découpe, ils comprennent qu’ils doivent mieux s’équiper au risque de perdre trop de temps » précise Marion Zahar.
Le coupe-carreaux manuel a la cote
Une chose est sûre, le coupe-carreaux manuel reste la référence et représente les trois-quarts des ventes en volume des systèmes de coupe du carrelage. Il fait partie de tous les équipements de base.
Au-delà des spécialistes du marché, il apparait également dans les gammes de ceux qui développent une offre d’outils dédiés au carreleur, comme Edma, par exemple, qui propose d’ailleurs des coupe-carreaux conçus en interne. Les gammes des spécialistes se caractérisent, elles, par une véritable profondeur de gamme, permettant de faire face aux différents formats et densités de carreaux. Si un coupe-carreaux de grande capacité, c’est-à-dire pouvant couper des dimensions importantes, peut venir à bout aisément des carreaux de petite taille, le carreleur, dans les faits, préfère disposer d’un modèle pour les formats courants qu’il pose et d’un autre, pour les épaisseurs et les formats plus conséquents. Ces derniers sont en effet plus lourds et plus encombrants, au point, pour les modèles les plus conséquents, d’être équipés de roulettes pour favoriser la mobilité.
Monorail ou double rail
De façon générale, le coupe-carreaux manuel, appelé aussi carrelette, une appellation déposée par PRCI, prend la forme d’une base en aluminium qui associe résistance et légèreté, cet outil devant être transporté sur le chantier. Ce socle est muni d’un guide ou rail et d’un chariot mobile doté d’une tête de coupe équipée d’une molette. Le chariot est à roulements à billes pour une plus grande précision et plus de confort d’utilisation. Pour les modèles les plus évolués, la précision de montage des roulements à billes s’effectue au micron près pour offrir un glissement impeccable, apportant qualité de coupe et gain de temps.
En ce qui concerne le mécanisme de coupe et le déplacement du chariot, deux grandes catégories de coupe-carreaux sont proposées sur le marché français, avec des performances équivalentes. Néanmoins, elles exigent une gestuelle différente pour le carreleur, l’incitant à privilégier l’un ou l’autre des modèles en fonction de sa formation et de ses habitudes. Correspondant à la tradition italienne, le type monorail est, en France, surtout répandu en PACA ainsi que dans la région savoyarde. Conçu par les Espagnols, le double-rail domine largement le marché français, sous l’influence du leader, Rubi. Généralement, les gammes des spécialistes comportent les deux types de modèles pour satisfaire les habitudes de tous les carreleurs.
Pour effectuer sa coupe, le carreleur fait coulisser son chariot en appuyant sur la molette, avec l’aide donc d’un guide ou d’un double guide, de façon à réaliser une trace en fonction de la dimension mesurée. Le marquage entame légèrement le matériau et affaiblit sa résistance sur un axe bien...