Les gants de protection
De plus en plus fins pour tous les métiers
Tiré par les normes mais aussi stimulé par le lancement régulier de produits innovants, le marché des gants de protection connaît une évolution jugée favorable par la plupart de ses acteurs. La hausse régulière de la performance des produits sur les deux attentes principales du marché – la performance de la protection et le confort d’utilisation – traduit l’expertise de fabricants qui développent des gammes conciliant de plus en plus souvent des impératifs techniques autrefois antinomiques.
Dans 20% des cas, les accidents du travail touchent la main et les doigts (source Carsat). Environ 125 000 personnes ont ainsi été victimes en 2015 de blessures consécutives à ce type d’accidents ayant occasionné une invalidité permanente pour plus de 5 500 d’entre elles et la perte de quelque 4,5 millions de jours de travail. La protection de la main est donc un enjeu important d’un point de vue humain, social et économique. Cet organe complexe qu’est la main, prolongement du cerveau humain dans l’accomplissement d’innombrables travaux, est en effet soumis à des nombreux types de risques dans le cadre d’une activité professionnelle, notamment dans les secteurs de l’industrie et du bâtiment. Pour la protéger avec le plus d’efficacité possible des différents types de risques encourus – le plus souvent mécaniques, chimiques et liés à la chaleur, au feu ou au froid –les fabricants conçoivent des produits de plus en plus sophistiqués en visant l’effet « seconde peau » qui conserve à l’utilisateur toute sa dextérité et contribue ainsi à renforcer sa productivité.
Fabrication traditionnelle
Une vingtaine d’années en arrière, un gant de protection était fabriqué selon trois techniques de base, lesquelles sont toujours en vigueur même si la première que nous évoquerons, celle du coupé/cousu, perd régulièrement du terrain. Mise en œuvre pour la fabrication de gants pour les risques mécaniques, elle consiste à découper sur des presses, via des emporte-pièces, les pièces de cuir ou de textile qui, assemblées par piqûre, formeront le dos et la paume des gants. Les célèbres gants dockers – lesquels génèrent un volume de ventes toujours très important sur le marché même si la suprématie de cette catégorie de produits est désormais menacée – et les gants de soudeur sont notamment fabriqués selon cette technique (dans le second exemple, le gant conjugue résistance mécanique et résistance à la chaleur).
Le trempage dans un bain liquide d’élastomère ou de plastique d’une forme en céramique et en métal permet la fabrication de gants pour la protection chimique (ainsi que des gants de ménage, sur le marché grand public) que ce process rend étanches, pour une période plus ou moins longue. Les gants trempés, vulcanisés ou gélifiés après le trempage, peuvent être supportés. Dans cette dernières hypothèse, un support tel un fin tricot est posé sur la forme avant le trempage. Les gants non supportés peuvent être portés à même la peau après avoir été floqués ou poudrés.
Les multiples possibilités du tricotage
Outre le coupé/cousu évoqué plus haut, le tricot est un mode de fabrication des gants pour les risques essentiellement mécaniques et thermiques. Elaborés dans diverses mailles (jersey, bouclette…) à partir de fibres naturelles et surtout synthétiques depuis d’assez nombreuses années, les gants tricotés, parfois lavables, existent avec ou sans couture (on parle alors d’un gant tricoté un fil). Dans ce dernier cas, leur confort est amélioré, car il n’existe aucun point de pression susceptible d’entrainer une gêne quelconque.
L’épaisseur du tricot qui joue un rôle à la fois sur la performance mécanique et thermique du gant mais aussi sur sa tactilité, élément-clé de la dextérité de l’utilisateur, est conditionnée par la jauge, laquelle est indiquée par un chiffre correspondant au nombre d’aiguilles utilisées par pouce. Plus ce chiffre est élevé (la jauge 18 étant citée par plusieurs fournisseurs comme la plus élevée existante aujourd’hui), plus le gant sera fin. Plusieurs fibres peuvent être mélangées dans un même gant, ce qui n’est pas le moindre des atouts des gants tricotés. Deux techniques rendent cette caractéristique possible, le vanisage et le guipage. Dans le premier cas, deux fils de natures différentes sont superposés lors du tricotage ; dans le second, le fil dit guipé possède une âme entourée d’un ou plusieurs fils différents.
Le tricoté enduit au cœur du marché
Last but not least, les gants tricotés peuvent être partiellement revêtus d’une couche de matière (l’enduction) qui non seulement renforce la performance du seul tricot mais, dans de nombreux cas, élargit le spectre des risques pour lesquels ils sont conçus. Aujourd’hui la majeure partie du marché de la protection de la main, tout particulièrement en ce qui concerne les gants pour les risques mécaniques, repose sur cette technologie mixte superposant tricot et enduction. Une catégorie de gants qui a supplanté les gants en cuir, lesquels conservent toutefois des adeptes (concernant cette matière naturelle, on peut signaler au passage que le cuir a retrouvé auprès des fabricants de gants de protection un regain d’intérêt, utilisé notamment sous forme de renforts jouant le rôle d’amortisseurs d’impacts). Depuis son apparition sur le marché dans le courant des années 1990, la catégorie de gants tricotés enduits connaît de régulières améliorations techniques, tant en ce qui concerne le tricot que l’enduction. Ces perfectionnements contribuent à renforcer la domination qu’exerce les gants tricotés enduits sur le marché – particulièrement sur le segment des gants pour les risques de coupure, laquelle constitue le risque contre lequel la grande majorité des utilisateurs de gants cherche à se prémunir.
La suprématie de cette catégorie de produits en matière de protection de la main contre les risques mécaniques s’explique aussi par la très grande diversité de versions dans lesquelles sont disponibles ces gants qui peuvent cumuler, au sein d’un seul et même produit, les avantages de différentes fibres et matières d’enduction. Les acteurs du marché dans leur ensemble s’accordent d’ailleurs à reconnaître que l’association de certains polymères et fibres techniques est l’un des principaux vecteurs d’innovation en matière de protection de la main, avec dans une moindre mesure le perfectionnement des techniques de tricotage.
L’avènement des fibres synthétiques
Depuis déjà bon nombre d’années, les matières naturelles dont la soie, le coton ou la laine ont été en grande partie supplanté par les fibres synthétiques. A compter des années 1930, des chimistes de réputation mondiale (l’Américain DuPont de Nemours, le néerlandais DSM, le Japonais Nihon Sanmo…) ont mis au point de nouvelles matières synthétiques pour l’approvisionnement de la filière Vêtements qui, plusieurs décennies plus tard, ont bénéficié au marché des EPI, et notamment à celui des gants. Ces fibres qui ont littéralement révolutionné la vie de nos contemporains sont toujours utilisées par les fabricants de gants de protection, parfois seules mais souvent utilisées en mélange. Parmi les plus utilisées figurent la fibre polyamide (le nylon en est une), une fibre légère, élastique, résistante à l’abrasion, lavable et rapidement sèche. Le polyester, aux caractéristiques proches du polyamide, l’acrylique ou encore l’élasthanne relèvent également de cette génération de fibres. Léger, doux et chaud, l’acrylique isole du froid et offre une grande résistance à la traction et à l’abrasion. Quant à la fibre élasthanne (le Lycra®, par exemple), elle est capable de s’étirer jusqu’à sept fois sa longueur pour reprendre immédiatement sa taille initiale dès que la tension s’arrête.
Des fils de plus en plus techniques
Plus récemment apparurent des fibres techniques présentant des niveaux de résistance aux risques encourus par la main jusqu’alors inédits. Sans faire la liste exhaustive de ces fibres, on évoquera dans les lignes qui suivent les principales classes de produits et leurs caractéristiques majeures.
Les para-aramides, une catégorie à laquelle appartiennent par exemple le Kevlar® et le Twaron®, sont utilisées pour leur niveau de résistance élevé à la coupure et à la déchirure et leur bonne tolérance à la chaleur. Leur performance sur ce dernier point les classe toutefois loin derrière une autre catégories d'aramides, les méta-aramides, dont fait notamment partie le Kermel®. Les fibres polyéthylène, dont un exemple est le Spectra® développé il y a quelque 25 ans par Honeywell (initialement pour des applications autres que la protection de la main), sont elles aussi résistantes à la coupure et à l’abrasion tout en étant insensibles aux produits chimiques et aux solvants. Pour renforcer la résistance à la coupure, il est techniquement possible depuis quelques années d’inclure dans les fibres polyéthylène d’un tricot des filaments d’acier ou d’inox. La fibre de verre peut aussi être utilisée dans le même objectif, mais il semblerait que le recours à cette matière allergène ne soit plus d’actualité dans le domaine de la protection de la main.
Plus récemment encore apparurent des fibres de haute technologie. On citera parmi elles le Thunderon®, une fibre anti-statique évitant la détérioration des composants ou produits manipulés, dotée en outre d’un effet antibactérien et d’une forte résistance à l’usure, en encore le Thinsulate®, une fibre hydrophobe au pouvoir chauffant élevé. Le graphène, une fibre proche du carbone aux multiples avantages (souplesse, longévité, légèreté, résistance élevée à la coupure, au feu et à la chaleur…) est considérée par la communauté scientifique comme l’une des principales innovations de ces quinze dernières années dans le domaine des matières synthétiques. Le domaine de la protection de l’homme au travail est l’une de ses nombreuses et toutes dernières applications (l’un...