Nourrisson
Colt : carton plein pour Riss Industrie
En acquérant le fabricant allemand Colt, Riss Industrie conforte sa stratégie basée sur la fabrication d’outils pour le bois en France et acquiert de nouveaux savoir-faire. A travers ses deux marques complémentaires, Riss la généraliste et Colt la spécialiste, l’entreprise de Montbrison est désormais en mesure de satisfaire les exigences de tous les professionnels du secteur, en France comme à l’export.
Les Établissements Claude Nourrisson, connus également sur le marché sous le nom de Riss Industrie, sont une figure emblématique de Montbrison, petite ville nichée entre plaine et monts du Forez, à une trentaine de kilomètres de Saint-Étienne
C’est dans ce bassin, aujourd’hui encore riche en PME spécialisées autour de l’outillage, que Claude et Laurent Nourrisson, deux frères, ont créé en 1897 chacun leur entreprise, l’une s’étant peu à peu orientée sur la fabrication de mèches à spire unique, l’autre sur les forets pour le bois. Ces deux structures n’en feront plus qu’une en 1986, à l’initiative de Jean-Yves Nourrisson, petit-fils de Claude.
Quatre générations
Plus d’un siècle s’est écoulé, et la société Nourrisson-Riss figure aujourd’hui parmi les trois principaux fabricants français de forets. Elle est même parmi l’un des derniers producteurs européens de forets standard pour le bois, avec environ un million de pièces fabriquées par an sur son site de Montbrison. En investissant en permanence sur les outils industriels et les compétences humaines, l’entreprise a su s’adapter pour faire face à l’évolution des marchés, y compris à l’international, sans perdre ni son ancrage régional, ni son âme familiale. Il faut dire que le site est toujours sur son emplacement d’origine, au cœur de la ville. Dans ces conditions, difficile d’ignorer la vie qui se passe autour de l’entreprise d’autant que plusieurs générations de Montbrisonnais ont participé à son évolution. « Le personnel a toujours été le fondement du développement de Riss en manifestant son réel attachement à l’entreprise, son réel intérêt de la satisfaction client, son amour du travail bien fait » explique Vincent Nourrisson, P-dg.
La famille Nourrisson n’échappe pas à ce mouvement. Depuis 2009, la quatrième génération a pris la relève. Après avoir passé quelques années au sein de la société, Vincent Nourrisson, fils de Jean-Yves, a effectivement repris les rênes, avec toujours à ses côtés Laurent, petit-fils de Laurent, l’autre fondateur. Au départ, pas forcément enclin à s’inscrire dans cette généalogie d’industriels, le jeune P-dg s’est laissé gagner par la fibre entrepreneuriale et a su saisir l’opportunité qui lui était offerte.
Consolider la production
En 2012, Riss aborde un nouveau tournant de son existence. Au printemps, elle a fait l’acquisition de Colt, société fondée par Horst Miebach en 1978. Une société française qui rachète une société allemande, l’information a déjà valeur de symbole par les temps qui courent, d’autant que la production de Colt a été transférée d’Allemagne en France !
Au-delà de l’anecdote, l’arrivée de Colt traduit la confirmation d’une stratégie axée sur la pérennité de l’entreprise. « Nous opérons sur des marchés qui ne sont plus en forte expansion. De plus, dans les cinq ans à venir, nous serons confrontés au renouvellement des hommes et du parc machines. L’objectif est donc d’avoir de nouveaux clients pour pouvoir investir. Par ailleurs, il est plus facile de transmettre un savoir-faire dans une entreprise en croissance qu’en stagnation. Nous devions donc consolider notre production » explique Vincent Nourrisson.
D’où ce projet de croissance externe, associé à un transfert de production sur Montbrison, aujourd’hui opérationnel. « Nous nous devons de garder ce qui fait l’âme de l’entreprise, son savoir-faire industriel, même si nous avons amplement élargi notre catalogue ces dernières années ».
Colt, l’expertise du bois
Avec Colt, Riss revient quelque part à ses origines, le travail du bois, après avoir élargi son offre au travail de l’acier et du béton. Si le positionnement de Riss se situe essentiellement sur les outils nécessaires aux travaux à l’extérieur de l’atelier, le savoir-faire de Colt s’oriente, lui, surtout sur l’atelier, avec des outils dédiés aux machines à bois et une production axée sur des séries plus ou moins importantes pour de grands donneurs d’ordre.
Ainsi, 40% du chiffre d’affaires de Colt est effectué à travers d’autres industriels, une évolution adoptée par les Établissements Nourrisson jusqu’en 1986 avant que l’entreprise développe sa propre marque, Riss. « Ces différences sont liées aux marchés nationaux sur lesquelles nos entreprises opèrent. L’Allemagne compte encore beaucoup de grands industriels de l’outillage. En France, pour assurer la pérennité de l’entreprise, nous devions développer notre propre marque et innover » souligne Vincent Nourrrisson.
Néanmoins, confronté à un environnement de plus en en plus concurrentiel, Jürgen Miebach, fils du fondateur, travaillait depuis deux ans sur le développement de la marque Colt, avec le renfort de dépôts de brevet sur des produits innovants. Difficile néanmoins pour cette PME de huit personnes de faire face seule à sa diversification. « Au fil des discussions, nous nous sommes rendu compte que nous partagions la même vision en termes de développements produits et marchés » se félicite Vincent Nourrisson.
D’ailleurs, Jürgen Miebach est resté dans le groupe puisqu’il est devenu responsable des ventes export chez Riss.
Un point d’ancrage en Allemagne
En Allemagne, à Lindlar (à proximité de Cologne), demeurent un bureau commercial, un bureau d’Étude et un bureau de Recherche & Développement qui travaille en partenariat avec les utilisateurs. Cette structure devient évidemment le point d’appui du développement du groupe en Allemagne. Si 40% du chiffre d’affaires de Riss (soit un chiffre d’affaires de quatre millions d’euros) est ainsi lié à l’export (Moyen-Orient, Amérique Latine, États-Unis, Canada, en Afrique, en Europe de l’Est, sans oublier un bureau commercial en Roumanie), la marque n’était jusqu’alors pas présente directement Outre-Rhin. Elle commercialisait surtout ses produits auprès de professionnels de l’électroportatif à travers un agent. « Aujourd’hui, nous disposons d’une vraie structure commerciale pour appuyer le développement de Riss dans ce pays » se félicite Patrick Lorne, directeur commercial du Groupe.
Colt va également profiter de cet apport sur son marché national. Son offre très spécialisée va être épaulée par le catalogue généraliste de Riss et lui permettra de proposer un programme complet. « Ce que Colt va amener à Riss en Allemagne, Riss va l’apporter à Colt en France » prévient Patrick Lorne.
Lancement de Colt en France
Si Colt est bien implantée en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux États-Unis, pays à forte culture du travail du bois, la marque est pour l’heure une inconnue en France. « Le marché des spécialistes du bois est dominé par d’autres fabricants allemands. Nous arrivons sur ce secteur avec des produits fabriqués en France, brevetés et souvent très innovants. Il y a de la place pour une marque comme la nôtre » estime Vincent Nourrisson.
Le fer de lance de Colt reste le Maxicut®, une mèche Forstner dotée de deux brevets : un affûtage unique avec rainures asymétriques brise-copeaux offrant une réduction des efforts de coupe et un système d’emmanchement autorisant un blocage automatique dans tous les types de mandrin et la mise en place rapide d’extensions de 90 mm, 150 mm et 270 mm mais aussi des adaptateurs cône morse. « Ce produit offre un confort immédiatement perceptible. C’est la clé d’entrée de Colt sur le marché français. Introduire une nouveauté sur un produit aussi classique que la mèche Forstner, c’est remarquable ! ».
Colt lance également en France ses forets bois double listel Twinland®, le ZeroMark® permettant grâce à sa pointe auto-perforante le pré-perçage des terrasses en teck ou le foret FCE en acier HSS, dont le taillage breveté permet une entrée et une sortie très nette, sans éclat alors que sa pointe de centrage facilite une bonne attaque du perçage, même angulaire.
Lancée dans l’hexagone début 2013, Colt se positionne ainsi comme la marque spécialiste des professionnels du bois, avec une offre en mesure de satisfaire des marchés exigeants et plus pointus que la cible de Riss, marque généraliste. « Cette acquisition marque un changement culturel dans l’entreprise. C’est la première fois que nous intégrons une nouvelle marque, elle-même dynamique. Il faut aussi le temps d’accorder le savoir-faire des deux entreprises ».
La marque Riss confortée
En France, les deux marques resteront donc bien distinctes, l’une renforçant le positionnement de l’autre. Désormais, l’équipe de vente de Riss qui comprend huit commerciaux exclusifs proposera les deux catalogues, celui de Colt, dédié aux ateliers spécialistes du bois et celui de Riss qui offre une réponse appropriée pour chaque besoin de perçage, taraudage, vissage et sciage, orientée donc principalement sur l’intervention sur le chantier. « L’intégration de Colt va nous permettre de mieux vendre certains produits trop spécifiques pour un catalogue généraliste, comme les outils plaquette carbure pour le bois qui rejoignent la marque Colt et son catalogue ».
Actuellement, 60% du chiffre d’affaires de Riss, soit six millions d’euros, est réalisé en France, dont la majeure partie (70%) à travers les quincailleries générales, suivies par les négociants en matériaux (15%) et la grande surface de bricolage (15%). « Si nous fabriquons les produits bois, nous ne nous contentons pas de proposer avec la marque Riss que du 20/80 sur l’acier et sur le béton. Nous avons une offre très homogène en rapport qualité-prix, avec différents niveaux de qualité, quels que soient les matériaux et produits. L’utilisateur ne sera pas déçu qu’il achète un foret pour le bois, l’acier ou le béton. Cela permet à un distributeur de travailler avec nous en confiance sur toute la gamme ». Visiblement, cette démarche porte ses fruits puisque les ventes de Riss enregistrent une belle croissance sur les huit premiers mois 2012, ce qui devrait lui permettre de clore l’année positivement, à périmètre constant, après un chiffre d’affaires 2011 traduisant une hausse de 4%.
De nouveaux atouts industriels
Côté production, les machines de Colt ont donc trouvé place dans le site de Montbrison. « Nous trouvons même un avantage concurrentiel à produire en France du fait du moindre coût de l’énergie ». Cet avantage n’est pas neutre, les dépenses énergétiques représentant environ 15% des coûts de production de l’industriel.
Surtout, à travers ces nouveaux outils de production, Riss gagne un savoir-faire qu’il ne développait pas jusqu’alors. Tous les forets Colt sont fabriqués selon la technologie de la forge alors que chez Riss, ils sont produits depuis longtemps selon la technique du taillage. Seuls certains forets haut de gamme disposent d’une tête forgée. Du fait du phénomène d’écrouissage de la surface, ce procédé évite de couper la microfibre de l’acier et améliore donc les propriétés mécaniques du foret.
« La forge est un procédé ancien mais adapté aux exigences nouvelles grâce à ces machines modernes qui nous permettent de produire très vite » explique Vincent Nourrisson. Un millier de forets forgés sont ainsi produits toutes les heures. Ce procédé présente même des atouts. Agissant selon un principe de déformation de l’acier, il permet d’économiser 30% de matière mais aussi de l’énergie puisque le traitement thermique s’effectue au cours de la même opération.
Colt apporte également à Riss de nouvelles machines pour l’affûtage automatique, ce qui permet de renforcer l’automatisation de la production.
Une culture industrielle
Le rapprochement entre les deux fabricants traduit incontestablement la volonté de Riss de consolider sa production en France. Les Établissements Nourrisson ont toujours été animés par leur culture industrielle. « Face à la Chine, une production automatisée en France présente un coût de revient de 15 à 20% plus élevé. Nous faisons le pari que d’ici cinq ans, nous serons encore plus performants. D’où notre préoccupation de conserver ce savoir-faire de façon à anticiper les changements à venir ». Actuellement, plus de 20% du chiffre d’affaires de Riss provient donc de sa propre production (70% de ses volumes à l’export). « Ce taux n’a pas baissé au fil du temps. Mais notre catalogue a connu un fort développement sur d’autres types de produits. Dans les deux ans à venir, avec l’intégration de Colt, il devrait rapidement grimper à 30% ».
Si en élargissant son catalogue à des produits acier et béton, Riss s’est tourné vers des partenaires industriels en Allemagne et en Asie, l’entreprise met en œuvre cette démarche avec sa logique de fabricant. « Nous ne sommes pas des acheteurs. Nous faisons fabriquer en Asie » souligne Vincent Nourrisson. Son savoir-faire de fabricant est effectivement déterminant dans la relation que nourrit Riss avec ses sous-traitants. « Grâce à notre culture industrielle, nous sommes crédibles vis-à-vis de nos partenaires. Nous savons fabriquer un foret, ce qui nous permet d’avoir une relation de co-développeur avec nos sous-traitants. Lorsque nous identifions le besoin, nous le comprenons, nous pouvons le formaliser en amont avec notre équipe technique de Montbrison ».
Ce savoir-faire est d’autant plus pertinent que si, au sein de son offre, Riss ne fabrique que ses outils pour le bois, il conçoit l’ensemble de ses machines-outils avec deux personnes dédiées. « Nous maîtrisons notre usinage acier, ce qui nous permet de concevoir des géométries particulières, tant sur les produits classiques que spécifiques ». C’est le cas du fraisoir dont les arêtes de coupe présentent un désaxage. « Même sur un produit banalisé, nous avons réussi à garder des spécificités. Ces petits détails contribuent au confort d’utilisation apprécié par l’utilisateur professionnel. Et c’est ce qui fait que nous sommes encore sur le marché, même sur des produits très basiques ».
Par ailleurs, l’entreprise puise également dans les compétences des sous-traitants qualifiés (brunissage, chromage…) de la région, qui représente d’ailleurs le second tissu de PME industrielles en France après l’Ile-de-France.
Maîtrise logistique
Cette maîtrise de savoir-faire s’exprime également au niveau logistique. Depuis 2006, Riss dispose d’un site à Shanghai, en Chine. Une équipe de douze personnes (huit pour le conditionnnement, deux pour la qualité et deux pour l’administration) est en charge du programme des produits entrée de gamme pour le métal. « Le site logistique de Shanghai nous permet d’avoir un stock de sécurité sur les produits en vrac. Par ailleurs, nous avons intégré la fabrication des conditionnements alors que beaucoup de nos concurrents sous-traitent cette fonction. Nous sommes ainsi certains de ce que nous mettons dans les boîtes ». Riss gagne également une meilleure vision de ses stocks, ce qui lui permet d’éviter au maximum les problèmes de rupture et de retard de livraisons. « Cette présence locale nous permet également d’améliorer nos relations avec nos partenaires fabricants » précise Vincent Nourrisson.
Gérant environ 10 000 références, le site de Montbrison bénéficie également d’investissements logistiques. Depuis 2009, Riss a beaucoup réfléchi sur cet aspect, en développant d’abord son propre logiciel informatique pour mieux coller à son métier et piloter efficacement l’entreprise. Elle a également acquis des stockeurs verticaux pour gagner en productivité et en fiabilité. « Nous sommes ainsi capables de livrer des petits paquets partout dans le monde depuis Montbrison. Vu le nombre de références que nous gérons, c’est un vrai savoir-faire. » Un système de génération automatique d’étiquettes personnalisées permet également de répondre aux attentes des MDD.
Par ailleurs, à la mi-novembre, l’entreprise intègre l’équipe du C.A.T. (Centre d’Aide par le Travail ) avec lequel elle travaille depuis longtemps, soit huit personnes et leur responsable. Cette équipe est en charge du conditionnement des produits. « Nous matérialisons une relation de partenariat nouée depuis bientôt cinquante ans. Nous allons gagner en réactivité, en flexibilité ». Ce rapprochement physique évitera les transferts de produits entre les sites puisque le C.A.T. était implanté à quatre kilomètres de Montbrison. « Et pour notre entreprise, c’est aussi la découverte d’un autre monde, celui du handicap. Cette intégration signifie la reconnaissance du savoir-faire de cette équipe par l’ensemble de l’entreprise » souligne Vincent Nourrisson.
Implantée comme on l’a vu au cœur de la ville, la responsabilité sociale de Riss est un véritable état de fait. Vincent Nourrisson est d’ailleurs lui-même impliqué dans de nombreux clubs et réseaux d’aides à la création d’entreprise et également dans le tutorat d’étudiants en provenance de lycées techniques. « Notre ambition n’est pas d’être introduit en bourse, mais d’être encore là dans cinquante ans ».
Une démarche d’entreprise responsable
- Développement durable : 1000 m2 de toiture Riss équipée de panneaux photovoltaïques permettent de satisfaire jusqu’à 25% des besoins énergétiques de l’entreprise
- C.A.T. intégré de 8 personnes
- Réflexion sur l’éco-emballage autour de l’utilisation de particules de calage à base de farines de céréales entièrement biodégradables ou compostables, 100% naturelles et sans O.G.M.
- Compactage des cartons en vue du recyclage
- Tri sélectif des déchets : plastique et carton
- Prise en compte des TMS par l’utilisation de tables ergonomiques, chaises et tapis roulants.
Riss en quelques chiffres
• Chiffre d’affaires global : 10 millions d’euros, dont 60% en France et 40% à l’export.
• Personnel : 60 personnes dont 22 à la production et 8 commerciaux exclusifs
• Surface de production : 3 000 m2
• Surface de logistique : 4 000 m2
• Grandes familles d'outils : perçage / fraisage /taraudage / vissage / sciage.